La correction fraternelle vue par St Augustin, St Césaire d'Arles, St Ambroise et Pascal
Quand nous donnons ces conseils, je crains que certains ne s’emportent plutôt contre nous que contre eux-mêmes. Car notre discours se présente comme un miroir à votre charité ; aussi, de même qu’une dame, lorsqu’elle se regarde avec attention dans un miroir, au lieu de briser le miroir, corrige plutôt sur elle ce qu’elle a vu de défectueux, ainsi il est juste que chacun d’entre vous, chaque fois qu’il reconnaît sa souillure dans une prédication quelconque, se corrige au lieu de se laisser aller à s’emporter contre le miroir de la prédication. De la même façon, ceux qui reçoivent des blessures veulent plutôt soigner leurs plaies que mépriser les médicaments.
Saint Césaire d’Arles, Sermons au peuple 42, 6.
Tu vois, par exemple, un frère courir au théâtre ? Empêche-le, avertis-le, montre-toi attristé si le zèle de la maison de Dieu te dévore. Tu en vois courir d'autres qui veulent s'enivrer, et qui veulent faire jusque dans les lieux saints ce qui n'est permis nulle part ? Empêche ceux que tu peux empêcher, retiens ceux que tu peux retenir, effraye ceux que tu peux effrayer, gagne en les flattant ceux que tu peux ainsi gagner, mais, du moins, n'en prend pas ton parti. C'est un ami ? Reprends-le avec douceur. C'est ta femme ? Arrête-la avec toute la fermeté. C'est ta servante ? Emploie même les coups pour la retenir. Fais tout ce que tu peux selon ta situation, et tu as accompli la parole : « Le zèle de ta maison me dévore. »
Saint Augustin, Homélies sur l'Évangile de saint Jean I-XVI, Paris, Institut des Études augustiniennes, 1993, Œuvres de saint Augustin, vol. 71, Tract. 10, 9, p. 571.
Corriger en tête à tête
Si tu découvres un défaut chez ton ami, corrige-le en tête à tête. S'il ne t'écoute pas, reprends-le ouvertement. Les corrections, en effet, font du bien et sont plus profitables qu'une amitié muette. Si ton ami se sent offensé, corrige-le pareillement ; insiste sans crainte, même si la saveur amère de la correction lui déplaît. Il est écrit au livre des Proverbes : « Les blessures d'un ami sont plus supportables que les baisers des adulateurs. »
Saint Ambroise, De officiis ministrorum 3, 12, 127.
Corriger dans la charité
Que nos corrections soient inspirées par l'amour ; qu'elles aient pour principe, non le désir de nuire au prochain, mais le zèle sincère de son amendement. Tenez-vous dans ces dispositions et vous obéirez parfaitement aux recommandations qui nous sont faites aujourd'hui : « si ton frère a péché contre toi, reprends-le entre toi et lui seul. » Pourquoi le reprendre ? Parce que tu serais ému des torts qu'il a eux envers toi ? Non ; si c'est l'amour propre qui inspire ta correction, tu n'obéis pas au précepte du Seigneur ; mais si c'est l'amour fraternel, tu es fidèle à l'esprit du Maître. Considère bien ses paroles et tu reconnaîtras quel motif doit te faire agir, si c'est l'amour propre ou l'amour du prochain. « S'il t'écoute, dit-il, tu as gagné ton frère. » Donc, ce que tu fais, c'est pour son bien, avec l'intention de le gagner. Si, pour le gagner, ta réprimande est nécessaire, c'est donc qu'il aurait péri sans elle.
Saint Augustin, Sermon 82, 4.
Quand on veut reprendre avec utilité et montrer à un homme qu'il se trompe, il faut observer par quel côté il envisage la chose, car elle est vraie ordinairement de ce côté-là, et lui avouer cette vérité, mais lui découvrir le côté par où elle est fausse.
Pascal.